Romance, nouvelle
Pendant que je suis dans les affres de mon déménagement, je vous partage une courte nouvelle que j'ai décidé de ne pas garder pour mon recueil de nouvelles.
C’est une des premières nouvelles que j’ai écrit pour mon recueil, et aussi la première que j’ai finalement décidé d’enlever quand je me suis aperçue qu’elle était bien moins réussie que les autres et que son ton différait drastiquement du ton global du recueil.
Pour vous redonner un peu de contexte, j’écris depuis quelques années (mais sérieusement depuis début 2024) un recueil de nouvelles cauchemardesques, certaines inspirées de cauchemars que j’ai véritablement eus, d’autres sorties de mon imagination – parfois, je l’avoue, un peu tordue.
Dans le cas de Romance, c’est un cauchemar que j’ai fait puis que j’ai tout de suite décidé d’écrire sous forme narrative. Comme c’est une nouvelle que j’ai choisi d’enlever, elle est évidemment pleine de défauts, mais je vous la partage telle quelle, d’abord dans une démarche d’honnêteté, mais aussi parce que j’ai obtenu mon nouvel appartement cette semaine et que, depuis, je ne m’occupe que de ça. Autant vous dire que je ne lis et n’écris pas beaucoup depuis quelques jours.
Romance
Lorsque son domestique lui annonça, après trois jours d’arrêt maladie, qu’il souhaitait démissionner, Fabienne Germain, bourgeoise grimée jusqu’à l’os, ne prononça pas une seule parole. Trop fière pour supplier quiconque de rester à ses côtés, elle choisit la réaction la plus simple et effective, c’est-à-dire la plus sensée : d’un coup de pied surchargé de violence, elle brisa le tibia à peine rétabli du domestique ankylosé. Ses hurlements emplirent la pièce mais ne purent couvrir les rires éhontés de la mère et de sa fille, qui se délectaient de la vue de cette jambe devenue angulaire sous l’effet d’une brutalité à ce point élémentaire.
Alors que les deux femmes se demandaient ce qu’elles allaient bien pouvoir faire du corps abîmé, la fille s’exclama : “Et si on jouait au jeu du chirurgien ?” Ensemble, elles prirent le domestique à bras le corps, descendirent les escaliers et le placèrent sur une longue table en bois. La fille sortit du placard adjacent une boîte en carton, délavée par le temps, afin de rappeler à sa mère les règles de son jeu préféré.
L’invitée, observatrice indifférente, bien que saisie d’un malaise instinctif, sortit rejoindre le fils qui, toujours innocent, se reposait près de la rivière. Il l’invita à nager à ses côtés, lui offrant une après-midi à la douceur inégalée dans cet endroit qu’elle ne connaissait pas. En réalité, elle n’avait même aucune idée de ce qu’elle faisait ici, de qui était cette famille si paisible en apparence, de qui était ce beau garçon aux cheveux bruns et aux yeux bleus. Elle savait seulement qu’ils devaient rentrer le soir même dîner avec la mère et la fille, et ce périple aquatique qui creusait sa faim était d’autant plus agréable qu’elle savait venir l’heure du dîner tant attendu.
Mais l’heure tournait, l’eau s’apaisait, et lorsque les deux tourtereaux rentrèrent dans la salle à manger, la mère et la fille étaient déjà attablées, le dîner camouflé par d’antiques cloches en argent. La maison était ainsi faite que lorsque l’on passait la porte d’entrée pour rejoindre la salle à manger, on passait forcément devant la cage d’escalier qui, il y a quelques heures, avait supporté le poids du vieux domestique. L’invitée jeta un coup d’œil sur sa droite, constata que la table du grenier avait disparu, et prit place à table avec ses généreuses hôtesses.
La cloche écartée, fourchette d’argenterie en main, l’invitée goûta avec délice au plat préparé par la mère : pâte brisée, tomates, ce qui ressemblait à des lardons, un peu de fromage… Décidément, l’accueil était royal ; le repas terminé, elle profita même de la chaleur du soir pour se promener avec ce fils angélique dont elle ne pouvait plus se passer. N’était-elle pas au paradis ?
LE JEU DU CHIRURGIEN
Minimum 2 joueurs
Rôles : 1 chirurgien (ou plus), 1 patient, 1 dé
Règles du jeu :
1. Le chirurgien dispose le patient sur une table longue, sur le dos. Il découpe avec soin ses vêtements, afin de permettre un meilleur accès aux outils et une meilleure visibilité.
2. Avec un scalpel (un couteau de cuisine fera l’affaire), il crée 9 incisions sur le corps du patient, donnant une visibilité optimale sur ses différents organes.
3. Le patient lance le dé. Le chiffre sur lequel il tombe indique au chirurgien l’organe qui sera retiré.
4. Le chirurgien retire l’organe du corps du patient.
5. Si le patient ne meurt pas dans les 30 minutes qui suivent, il a gagné ! Il peut relancer le dé.
Attention ! Pour éviter tout gaspillage, le chirurgien doit ensuite disposer du corps du patient : au compost, dans une quiche, dans la cage des hamsters…
Littérairement vôtre,
Ève
Mon dieu, quel texte tordu et dérangeant... j'adore ! 👏